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Vendredi 5 décembre 2014, le Clan des Grands Malts organise sa soirée « portes ouvertes », la grand-messe annuelle où l’on propose à tous les membres du club, un choix de 8 whiskies unanimement appréciés parmi la cinquantaine de malts dégustés au cours de l’année 2014
L’ambiance est chaleureuse et festive malgré le cadre un peu froid et impersonnel d’un restaurant d’entreprise de Bercy privatisé pour l’occasion.
À la décharge des organisateurs, il est difficile de trouver un lieu financièrement abordable à Paris pour une soixantaine de personnes et plus...
C’est Gilbert Delos, journaliste et bièrologue qui a dégusté et rédigé une note de dégustation pour chaque whisky dont je vais m’inspirer pour ce post. Connaisseur émérite et membre du club depuis 15 ans, Il a jusqu’à aujourd’hui commenté plus de 700 whiskies, beau palmarès ! Son dernier ouvrage intitulé « 101 bières à découvrir » (Ed. Dunod) est sorti cette année et sera en bonne place dans la bibliothèque du Monde du Whisky.
Démarrage en douceur avec le Teeling - 46°, ce blend Irlandais ambré vieilli en fûts de rhum dégage un nez moelleux, vanillé et épicé. Le rhum et la banane dominent en bouche puis laissent la place à une finale persistante et épicée. On croirait boire un bourbon... Comme Gilbert, on s’interroge sur le caractère peu Irish de ce whiskey. Les Teeling ont un ancêtre créateur de distillerie à Dublin en 1782. Forts de cette hérédité, John (le père) a fondé la distillerie de Cooley en 1987, tandis que son fils Jack est aujourd’hui aux commandes de la première distillerie construite à Dublin depuis 125 ans. Embouteilleur indépendant, il propose un single malt vintage reserve de 21 ans et plus rare, un Poitin à 61,5° (le whiskey clandestin d’autrefois).
J’enchaine avec un Springbank 9 ans - 54,7° vieilli en fûts de vin Barolo Gaja : ce malt doré dégage un nez délicat de tourbe et de cake, suivi en bouche d’un mariage subtil de pommes cuites et d’épices. La finale longue, et riche, est un peu astringente ; une belle découverte ! Comme le déclare Gérard Trentesaux, ancient president du Clan, ce whisky charmeur et élégant est « mellowing » en d’autres termes, harmonieux doux et équilibré pour un whisky aussi jeune.
Fondateur et propriétaire de cette distillerie sans discontinuer depuis 1828, la famille Mitchell produit cet élégant whisky à Campbeltown depuis le maltage de l’orge jusqu’à la distillation, unique en son genre : deux fois et demi. (le cas général en Écosse est la double distillation, triple en Irlande) Le whisky mature sur place et les hommes sont présents à chaque étape de la production, jusqu’à l’embouteillage. Springbank qui produit également les whiskies Longrow et Hazelburn, est la seule en Écosse à n’avoir jamais filtré à froid ni coloré ses malts.
Vient ensuite le Bladnock 22 ans - 53° single cask embouteillé par Duncan Taylor : sa robe jaune dorée dégage un nez riche et gourmand, beurré comme un croissant viennois ; passé l’attaque franche de l’alcool, on a la sensation de sucre et de fruit en bouche (ananas et citron) ainsi qu’une note sèche et poivrée en finale. Le mariage avec le brie est savoureux et remporte un franc succès parmi les convives. Cette ferme-distillerie des Lowlands a connu de nombreuses ouvertures-fermetures par le passé. Jusqu’à ce qu’un Irlandais en recherche d’une résidence secondaire, rachète les murs en 1999 et relance la production. Suite à des problèmes financiers, elle est à l’arrêt depuis janvier 2014.
C’est avec une certaine curiosité que je hume ce Laphroaig 11 ans - 43,5° embouteillé spécialement pour le Clan : vêtu d’une robe jaune clair, il est doux et épicé et sa tourbe étonnament discrète pour un Laphroaig. Des saveurs de gingembre et de poivre gris apparaissent en bouche, dominées par la tourbe qui reprend graduellement le dessus. La finale est plutôt astringente. Distillerie emblématique d’Islay, Laphroaig créée en 1815 possède ses propres tourbières qui lui assurent des siècles de distillation ainsi que ses aires de maltage toujours en service jusqu’à ce jour.
Je poursuis l’expérience gustative en compagnie d’un Auchroisk 24 ans - 57,5° Cadenhead’s - small batch 1140 bouteilles : de couleur jaune doré, il dégage un nez boisé, et des volutes couleur caramel, café et noisette ; on distingue très nettement l’influence du fût de Xérès. Une bouche à dominante de fruits confits et poivrés. Une finale chaude et rayonnante où les fruits et épices s’estompent lentement. La distillerie d’Auchroisk voit le jour en 1973 suite à la découverte fortuite de « Dorie’s well spring » une source de qualité exceptionnelle, située sur un terrain à vendre près du village de Keith. L’heureux découvreur, un cadre de l’entreprise Justerini & Brooks (J&B) persuada ses supérieurs d’acheter la parcelle pour y construire une distillerie.
C’est au tour du Ben Nevis 17 ans – 46° Cadenhead.
Belle robe jaune claire. Nez frais, herbacé, un peu piquant. Attaque plutôt ronde, il devient vite acéré. La poire mûre domine ensuite, avec un peu de poivre noir qui relève l’ensemble. Très sec, avec une astringence tannique bien marqué sur la finale. C’est plutôt un whisky d’apéritif, mais j’avais déjà choisi le Teeling pour commencer ma dégustation
Ben Nevis tient son nom du gaélique « Montagne effrayante ».Situé à l’Est de Fort Williams dans le Comté d’Inverness (à l’ouest des Highlands), c’est le sommet culminant d’Écosse et du Royaume Uni (1334m). De ses flancs jaillissent les sources pures qui alimentent la distillerie fondée en 1825
Difficile de passer à côté de cet Ardbeg UIGEADAIL – 10 ans - 54,2° vieilli en fûts de Xérès et de bourbon.
Élégamment paré d’une belle couleur dorée, il est marqué au nez par la tourbe et les fruits secs ; moelleux en bouche, il dégage des notes de cake aux fruits confits. Equilibré jusqu’à la finale (très longue !!!) c’est une gourmandise sans cesse renouvelée, je n’ai pas envie de m’arrêter.
Fondée en 1815, cette distillerie emblématique d’Islay maltais encore elle-même son orge il y a peu. L’appellation UIGEADAIL provient du nom du loch Uigeadail qui alimente la distillerie d’une eau pure et très tourbée.
Les papilles encore imprégnées de tourbe, je me rince soigneusement la bouche et marque une pause avant de déguster un Woodford double oak – 43,2° pour accompagner le dessert (Tiramisu). Ce bourbon du Kentucky a été distillé à Early Times. Sa couleur est cuivrée et son nez d’une grande douceur distille des notes florales épicées et boisées.
Moelleux en bouche, malgré une attaque un peu sèche, la finale s’estompe sur des notes florales et vanillées.
Belle dégustation pleine de surprises et de découvertes. Rendez-vous en 2015…